Edition en projet                Couverture en projet           Liste des ouvrages

                                                              


                                INTRODUCTION

                       

                                                                                            Lecteur. Pour vivre bien content

                                                                                            Lisez pour apprendre à bien vivre,
                                                                                            Et ne perdez point votre temps
                                                                                           
A chercher les fautes d’un livre.
                                                                                           
Il n’en est point de si parfait,
                                                                                            Où vous ne puissiez reprendre
                                                                                           
Il n’en est point de si mal fait,
                                                                                          En qui vous ne puissiez apprendre.
                                                                                                            Jean de La Rivière.1721.


C’est à l’école technique que j’appris qu’il était possible de représenter géométriquement les couleurs. Au cours de signalisation des chemins de fer, il nous fallait vérifier la teinte des feux installés le long des voies en disposant des points dans un triangle. Un demi siècle plus tard, ce genre de méthode, autrefois réservé à de rares initiés, est manifestement à la portée de chacun de nous dans les logiciels de retouche d’images; les grosses lampes de couleur sont simplement devenues de petits carrés dénommés pixels. Notre professeur, qui était un passionné, nous expliquait le pourquoi de cette représentation des couleurs. Actuellement, les logiciels graphiques ont une section baptisée "aide" qui n’explique rien du tout. Nous avons l’intention d’en dire bien plus, ce qui n’est pas bien difficile.

Il y a couleur et couleur!

Dès l’abord, pour éviter tout malentendu et au risque d’anticiper, il faut absolument convaincre le lecteur qu’il existe trois façons totalement différentes d’appréhender les couleurs.

Les couleurs "matérielles".

L’approche la plus ancienne, la plus courante et la plus naturelle consiste à observer simplement autour de soi la couleur des choses: les arbres, le toit des maisons, le ciel, notre peau, une fleur, un tableau ou un illustré. L’expérience montre que ces objets n’ont pas de couleur propre, mais une façon de se comporter vis à vis de la lumière qui les éclaire. Léonard de Vinci, dans ses conseils aux peintres, en avait déjà fait la remarque: "Si tu prends une lumière et la place dans une lanterne teintée de vert ou de toute autre couleur transparente, tu verras par expérience que les objets qu’elle éclaire semblent emprunter leur couleur à la lanterne. Tu auras également vu à l’église comment la lumière, en traversant les vitraux teintés, prend la couleur du vitrail".

Autrement dit, pour envisager la couleur d’un objet quelconque, il faut considérer deux aspects indissociables:

  1. la lumière, généralement blanche, qui l’éclaire, qu’il s’agisse du soleil, même caché, ou d’un quelconque éclairage artificiel.
  2. La façon qu’a l’objet de transmettre ou diffuser en direction de notre oeil une partie de cette lumière, ce qui fait que l’herbe est verte, le ciel bleu et les bananes jaunes si elles sont mûres.

Les couleurs "impalpables"

Il existe une autre source de couleurs, toute récente mais qui a déjà envahi une partie non négligeable de notre vie: celle diffusée par les écrans de télévision et d’ordinateurs. Ici l’approche est totalement différente car la mosaïque de pixels tricolores formant ces écrans ne doit rien à la lumière ambiante et projette directement dans notre oeil sa lumière colorée. On comprendra aisément que les couleurs "matérielles" et "impalpables" n’obéissent nullement aux mêmes lois. Cela explique que le peintre et l’informaticien ne parlent jamais des couleurs en utilisant le même langage.

Les couleurs "spectrales"

Il existe aussi des circonstances, fort peu courantes à vrai dire, où l’on peut observer les couleurs impalpables les plus intenses qui soient, les couleurs dites "spectrales". Un coup d’oeil attentif à un beau diamant bien éclairé nous montre ces couleurs d’une pureté inégalées. C’est ce phénomène qu’étudia Newton à l’aide de prismes, ce qui nous a permis de comprendre ce qu’est la lumière et la couleur. Si l’on ne dispose ni d’un diamant ni d’un prisme (le premier est plutôt cher, le second quasi introuvable), nous conseillons au lecteur de placer en plein soleil un compact disc (CD), un des objets standardisés les plus vendus au monde. Il constatera, qu’en l’inclinant, il lui est possible de faire défiler ces incomparables couleurs spectrales. Dernier moyen, il suffit de sortir de son portefeuille un billet de cinq euros (inutile de trop investir) et d’observer au soleil la bande réfléchissante destinée à décourager les imitateurs.

Notre démarche

1. Avant que Newton ne s’intéresse aux couleurs, ce qu’il fit en l’an de grâce 1666, certains les avaient étudiées mais sans comprendre ce qu’était vraiment la lumière blanche qui nous éclaire. Nous ferons allusion à ces recherches, qui concernaient surtout cette superbe expérience naturelle qu’est l’arc-en-ciel. Par contre, Newton prit les couleurs spectrales à bras le corps. Il construisit même le premier télescope pour éviter l’apparition de ces couleurs que l’on constatait dans les lunettes astronomiques.

Il imagina aussi de replier le spectre solaire de façon à former un cercle permettant de prédire l’effet du mélange des couleurs, démontrant au passage l’existence des couleurs complémentaires. Ce cercle est toujours devant nos yeux dans les logiciels graphiques.

2. Nous avons présenté le minimum de connaissance de physique nécessaire pour aller plus loin et cela en comparant le son et la couleur, phénomènes très différents quoique analogues à bien des égards.

3. Partant de ce que nous a appris Newton, nous avons présenté les diverses façons de quantifier les couleurs et de les présenter sur l’écran des ordinateurs.

4. Nous avons suivi pas à pas les recherches de Thomas Young, Hermann von Helmholtz et James Clarke Maxwell, trois géants de la pensée scientifique qui montrèrent que toutes les couleurs peuvent être générées par le mélange de trois d’entre elles convenablement choisies. Nos téléviseurs, ordinateurs, imprimantes et appareils numériques actuels sont une application directe de leurs travaux.

5. Un petit voyage à travers la rétine nous permettra de comprendre la base biologique de leur théorie. Nous essayerons au passage de mieux comprendre les daltoniens, une minorité non négligeable qui vit parmi nous.

6. Depuis toujours, les images colorées que nous observons sont constituées de pixels, même si ce terme vient tout juste d’entrer en force dans notre vocabulaire. Dans cette optique, si l’on peut dire, nous examinerons de près le fonctionnement des écrans de nos téléviseurs et ordinateurs.

7.C’est paradoxalement après ces dispositifs modernes que nous essayerons d’expliquer, à la suite de Helmholtz, la façon dont se colorent tous les corps qui nous entourent, ainsi que de quelle façon on a réussi à imprimer et photographier en couleurs.

8. Nous proposerons au lecteur de découvrir l’état actuel des recherches sur la couleur; nous sommes bien loin d’avoir tout compris.

9. Nous verrons comment se colorent les êtres vivants  Nous terminerons par un petit dictionnaire des couleurs qui nous permettra de méditer sur les termes qui les qualifient, termes à la fois vagues et familiers.

Les découvertes fondamentales qui concernent les couleurs, comme la dispersion, l’achromatisme, le cercle chromatique, la théorie des trois stimuli et la quadrichromie ont été traité dans une perspective historique avec un certain luxe de détails. Pour remonter aux sources, nous n’avons pas hésité à citer de très larges extraits de ces chercheurs même si les alea des traductions et leur langue vieillie demande une certaine concentration.

Toute réflexion sur la couleur est par essence multidisciplinaire car elle intéresse toutes sortes de gens qui s’ignorent totalement : les opticiens, les biologistes, les artistes, les psychologues, les historiens, les informaticiens, les imprimeurs et tant d’autres. On ne s’étonnera donc pas de la différence de ton entre les différents chapitres.

Si le lecteur désire assimiler le contenu de cet ouvrage, ce que nous espérons, nous lui conseillons de s’exercer sur les couleurs en se servant d’un ordinateur familial ou de celui du bureau ( à n’utiliser qu’en dehors des heures de travail!). Nous lui indiquerons bien entendu les logiciels gratuits aisément disponibles.